Salut, mon deuxième bébé! (et aux autres, on sait jamais) Il faut que je te parle.
Je vais te le dire tout de suite : je ne sais pas encore si je vais te mettre au monde. La vraie raison pour laquelle j'hésite à te créer, la raison qui me fait douter est inhabituelle, je pense.
Il y a bien sûr cette culpabilité de te faire vivre dans ce monde… mais j'essaie de ne pas y penser.
On pourrait aussi penser que ce soit parce que ton existence ruinerait mon cerveau, je le crains. C'est bien connu, nous les mères, perdons toutes une partie de notre intelligence en mettant au monde nos enfants. J'ai déjà eu ton frère, que me resterait-il si je devais en léguer encore un bout? Mais ce n'est pas pour ça que j'hésite.
Sinon, je pourrais hésiter à surcharger mon agenda. Un cours par ci, un rendez-vous par là, des courses à faire. Je cours déjà pas mal, je te dirais. Mais ce n'est pas ça non plus.
Ça mettrait aussi en jeu mon pauvre cœur, qui tressaillirait deux fois plus souvent en vous voyant tomber. Deux fois plus d'angoisses. Deux fois plus de questionnements à savoir ce que vous faites, comment vous allez, si vous vous portez bien, pendant que je suis au boulot. Je ne sais pas si je pourrais me gérer…
Il se pourrait aussi que je craigne de ne pas pouvoir t'aimer autant que ton grand frère, qui est toute ma vie. Que je refuse de partager mon temps entre deux, que j'aie peur d'avoir un préféré ou même d'abandonner mon premier bébé, de ne plus pouvoir me consacrer à lui autant que quand il était le seul.
Mais ce n'est pas ça… en fait, c'est pire que tout ça : j'ai peur de t'aimer autant.
C'est que, vois-tu, j'aime tellement ton grand frère que des fois ça me fait mal, ça me tord les boyaux, et les larmes me piquent les yeux. Je ne sais pas si mon cœur pourra supporter de se gonfler encore plus, tu comprends? J'ai peur que mon cœur grossisse tellement d'amour qu'il finisse par exploser. Je t'aime déjà trop et tu es encore dans le néant, alors imagine…
Mais tu sais, je pense que je t'aime trop pour ne jamais te rencontrer. On verra bien si la vie nous le permettra, mais d'ici là, je te le dis, je t'aime…
Comme je me reconnais dans ce texte. C'est comme si c'était moi même qui l'avait écrit. Je suis en plein dedans, et jusqu'ici je me pensais seule. Merci pour le partage