J'ai 37 ans, j'ai vécu une enfance paisible pendant laquelle je pouvais aller jouer sans que ma mère ne puisse me tracer au GPS... Je rentrais quand j'avais faim et je jouais avec insouciance. Je n'avais ni peur des étrangers ni peur des maladies.

Je me souviens de faits marquants tels que la fameuse éclipse de soleil où j'ai dont eu peur, même avec mon casque de soudure, de perdre la vue... Ça a marqué mon imaginaire, beaucoup... J'ai un souvenir clair de cette journée : je me rappelle même du beau temps et de la chaleur extérieure... Je pourrais vous décrire cette journée même si j'avais l'âge d'être au primaire.

Je me remémore aussi cette soirée du 25 novembre 1988, ce fameux soir où la Terre a tremblé dans ma campagne proche de l'épicentre, où l'on a vécu 6,2 sur Richter pendant quelques secondes. Quelques secondes qui m'ont fait avoir une peur bleue des tremblements de terre. En remarquant à quel point ces évènements courts et sans conséquences m'ont marquée, je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec ce qui se passe en ce moment.

Une quarantaine, j'ai 37 ans et jamais je n'ai vécu cela. Jamais en 37 ans je n'ai eu peur de la propagation d'une maladie possiblement mortelle. Quand je parle avec mes ados, je ne peux que constater qu'ils seront marqués par cet évènement. De plus, je suis infirmière, ce qui rend la situation encore plus particulière pour eux. Reste que n'importe quel humain en construction de sa personnalité sera modifié par un évènement tel que celui que nous vivons avec la Covid-19.

Comme parent, je me fais rassurante, mais je vois bien que cette naïveté que j'ai eue comme enfant et jeune adulte ne pourra pas être la même pour eux. J'ai grandi en croyant qu'un tel évènement était soit impossible, soit improbable. Dans les scénarios catastrophes d'Hollywood, je voyais un simple divertissement et une exagération incroyable et je dirais que ça a même contribué à ce que je puisse penser qu'une pandémie n'arriverait probablement jamais. Je n'ai jamais connu la contrainte de rester à la maison à la demande du gouvernement. Il y a une naïveté impossible à conserver pour un ado ou un enfant en âge de comprendre et qui vit cela. Plus jamais ils ne vivront la vie avec l'insouciance d'une personne qui croit que ce genre d'évènement est impossible. Plus jamais nos enfants n'auront cette naïveté face à la maladie.

Ce que nous vivons en ce moment passera à l'histoire. Ce que nous vivons en ce sombre moment sera gravé à jamais dans la tête de nos gamins et dans leur mémoire d'enfants, il y aura ce souvenir que c'est possible... Dans leur vécu, il y aura cette fois où tout a fermé, cette fois où il était interdit d'aller à l'école, d'aller en public. Alors que pour nous adultes il y a encore quelques semaines, c'était du domaine de l'inimaginable, eux ne vivront jamais en pensant que la vie ne peut se transformer en scénario hollywoodien, car ils l'auront vécu...

Au delà de cette folie entourant le papier de toilette, comme adultes, c'est à nous de leur faire vivre cet évènement dans le plus de calme possible, dans un civisme plus posé que jamais. Même si jamais ils n'oublieront, tentons de leur montrer le beau, la collaboration, l'entraide et tout ce que l'humain a de beau à offrir, pour qu'au final ils croient en l'humain plus fort qu'en leur peur d'une catastrophe ! C'est une responsabilité de société que de leur donner au moins cela, pour que de toute cette folie reste un peu de candeur.

2020 sera un tournant, il y aura le «avant» et le «après» Covid-19... Faisons en sorte que le «après» soit plus beau que le «avant» pour ne pas laisser cette génération de futurs citoyens être une génération désabusée. Créons des mouvements de solidarité, retournons aux valeurs de base. Il est important de réaliser que la vie a pris une tournure incroyable et que c'est à nous de refaire le monde pour nos enfants, en commençant par une quarantaine joyeuse ! Après tout, j'aimerais que mes enfants n'aient pas peur de l'humain comme j'ai peur d'un tremblement de terre ! Alors peace gang ! Pas de bagarre pour une peur de manquer de papier de toilette, on est plus fort que ça !

Je profite de cette tribune pour remercier tous les soignants, ceux qui s'impliquent de près ou de loin dans la désinfection, jusqu'à ceux qui garderont nos enfants... Je veux dire à ceux qui ont peur financièrement que le Québec a l'un des peuples les plus généreux, ils ne vous laisseront pas tomber.

Si vous me lisez vendredi soir, on flash nos lumières à 20 h 30 pour dire à tout le monde qu'on est là et qu'on va surmonter tout ça ! Un petit geste qui peut rendre les enfants joyeux et faire sentir moins seuls les gens de partout ! Voyons si on peut laisser un peu de Jean-Marc nous faire sourire encore 25 ans plus tard !!!

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