Je sais que c’est difficile à comprendre, du haut de tes deux ans toutes tes dents, mais parfois, j’ai envie d’être seule. Juste envie de ne rien entendre, de faire le vide...
Je sais que c’est difficile à comprendre, parce que toi tu fais pipi où tu veux quand tu veux, et que ça te divertit beaucoup de me suivre quand je ressens cet appel de ma vessie. Je sais, tu trouves ça amusant de t’assoir sur ton petit pot pour me raconter ta journée en me regardant dans les yeux pendant que je fais pipi. Mais des fois, j’aimerais ça être seule.
Oui, c’est certain que j’ai besoin de reprendre mon souffle de temps en temps. Tu vois, j’ai besoin de silence le temps de me dire que je suis une bonne maman, que je ne suis pas parfaite, mais que mon amour est infini. Besoin d’être seule pour pleurer de fatigue ou parce que ma sauce à spaghetti est trop sucrée. Besoin d’être seule pour recevoir l’information divine de la vie me suggérant tel projet fou qu’il me faudra des siècles à mettre sur pied. J’ai besoin d’être seule, un peu comme toi des fois, pour faire mon petit caca!
Je sais, pas facile à comprendre, mais j’ai un blocage sanitaire en public, tu vois. Une tâche aussi simple qu’un pipi génère bien des angoisses lors d’une sortie au centre commercial. Trouver la cabine la plus loin, la moins entourée, vérifier le loquet, est-ce que la cuvette est vide, est-elle défectueuse, etc..... L’enfer quoi!
Alors j’ai, par miracle, accepté ta présence dans la salle de bain pour mon pipi routinier, mais mon caca ne sortira pas avec toi! Je dois le faire toute seule!
Bon ok, quelquefois je vais prétexter un #2 pour décompresser de ton humeur de journée grise en jouant à Plant’s VS Zombies sur mon téléphone... mais ça n’arrive que très rarement.
Alors ne m’en veux pas de te barrer la porte sous le nez. Je suis désolée de te faire pleurer, oui oui, je t’entends ne t’en fais pas. Si ça peut te rassurer, je sais que tu ne m’entends sûrement pas dans ton torrent de larmes de colère, mais parfois j’essaie de te parler pour atténuer ta grosse peine de ne pas pouvoir partager le trône avec moi. De me perdre deux minutes dans ce si court 24 heures.
Je m’en veux un peu tu sais, de ne pas avoir cette facilité d’expulser en public. Maman sait très bien quel beau cas elle serait pour un psychologue, mais je préfère garder ce petit détail de ma vie pour moi toute seule. Je veux juste deux minutes, deux toutes petites minutes sur mon trône en porcelaine, loin de mes chers sujets. Deux minutes et je te promets d’être de bonne humeur en sortant. Deux minutes et on retourne jeter de la farine partout, écouter tes livres parlants ou se peinturer les bras avec tes crayons feutre non-toxiques les plus lavables au monde.
Deux minutes et on oublie tout... jusqu’à demain!