"Maman, quand tu as décidé d'avoir un enfant, tu n'as peut-être pas tout de suite pensé au conséquences que ça aurait sur toi. Tu savais bien que ta vie changerait, que tu passerais de femme à mère, mais tu n'as pas réfléchi à l'aspect physique. Tu pensais aux câlins, aux bisous, à ma bonne odeur, à mes petites mains, aux bricolages que je te ferais. Tu n'as probablement pas prévu que tu changerais à ce point-là.
Les vergetures, les seins tombants, la perte de cheveux, le ventre mou, ce n'est certainement pas ça que tu avais d'abord en tête. Je sais bien que tu espérais que tu pourrais t'en sauver, parce que les actrices, elles, ça ne parait jamais. Parce que ton amie, elle n'a pas eu de vergetures. Parce que ta sœur a retrouvé son poids d'avant en une semaine. Pourquoi pas toi, tu t'es dit. Mais non, ça a fini par arriver. Les vergetures ont monté comme une vigne sur ton ventre dans les dernières semaines avant ma naissance. Même que plusieurs d'entre elles sont apparues après la 40e semaine, parce qu'en plus, je suis arrivé en retard. Tu te dis que celles-là, elles n'auraient pas été là si j'étais né deux ou trois semaines avant, comme tu l'espérais.
Quand tu as décidé d'allaiter, tu as fait ça pour moi avant tout. Tu ne pensais pas que des seins qui ont été gorgés de lait, une fois qu'il n'y en a plus, ne sont plus ce qu'ils étaient avant.
Mais maman, tout ça, ça fait de toi une maman. Pour moi, tu seras toujours la plus belle des mères. Et papa aussi te trouve belle, il me l'a dit. Il te voit différemment, c'est vrai, mais sa perception a évolué au même rythme que je grandissais en toi. Il t'a trouvée tellement forte depuis le jour où je suis né, il t'admire. Son regard sur toi est différent, je sais que tu as remarqué. Ces marques roses, blanches, violettes sur ton ventre, tes cuisses, tes seins, tes hanches, ces cicatrices… ça prouve que tu as travaillé fort, que tu m'as porté pendant 41 longues semaines, que tu as tout donné pour me mettre au monde et pour me nourrir, me permettre de grandir en santé. Ne crois-tu pas que ça en valait la peine? Tu n'es pas belle "quand même", maman. Tu es belle tout court."