Le deuil sportif est sans aucun doute un petit deuil. Même si certains parents le prennent plus dur que d’autres, à la base, il n’implique rien de majeur comme une maladie ou un décès. Il peut signifier la fin d’un rêve, une réorientation de nos priorités ou de notre façon de gérer notre éducation, mais est-ce que c’est si grave? J’ai vécu le deuil sportif de mon garçon alors qu’il était âgé de 4 ans et demi. En fait, c’est à cet âge que j’ai compris que pour mon bonheur et pour le sien, je devais lâcher prise.

Avant même de savoir que j’attendais un garçon, mon chum et moi avions déjà notre plan «infaillible» pour nous «assurer» une adolescence facile et sans montagnes russes (comme si ça existait vraiment). Nous allions initier nos enfants au sport le plus rapidement possible pour leur inculquer les valeurs du partage, du travail d’équipe, de l’accomplissement, de la persévérance et des saines habitudes de vie.

Bien sûr, quand nous avons su que notre bébé était un garçon, notre imagination s’est mise à déraper. Je n’avais rien de moins qu’un futur Sidney Crosby dans le ventre. Avant même de lui voir la binette, je cherchais quel était l’âge auquel nous pouvions l’inscrire au hockey. Sachant tous les sacrifices que ça occasionnait, je me voyais à tous les samedis me lever à 6 h du matin pour me geler les fesses sur les bancs de l’aréna pour encourager mon champion. Je planifiais déjà les cadeaux de Noël (équipement de hockey) que nous demanderions à Papy qui travaille justement dans un magasin de sport. Je m’imaginais déjà à toutes les arénas du pays et des États-Unis pour encourager mon joueur du Canadien (non, je ne me suis pas arrêtée au pourcentage de joueurs de hockey qui se rendent vraiment dans la LNH… un rêve, c’est un rêve, on le gâche pas avec des statistiques!) Malheureusement, 4 ans et demi plus tard, j’ai compris que malgré tous mes efforts, malgré toute ma bonne volonté, mon garçon ne serait jamais un sportif.

Lorsqu’il avait 6 mois, je l’ai inscrit à la natation. C’est l’un des premiers cours auquel on peut inscrire un enfant. Bien entendu, c’est beaucoup plus un cours d’intégration à l’eau qu’un vrai cours de technique de nage, mais c’était un premier pas pour l’habituer lui et nous, les parents, à nous lever les samedis matins pour les activités de nos enfants. En même temps, si ça peut contribuer à éviter une noyade, que peut-on espérer de plus? Mon garçon n’avait pas de plaisir. Il trouvait l’eau froide, avait peur de se mettre la tête dans l’eau, ne voulait pas bouger les jambes et ne faisait que se laisser tirer dans l’eau. Je n’ai pas abandonné, il n’aimait peut-être pas l’eau.

À deux ans, je l’ai inscrit à un cours de soccer. Je voulais qu’il coure pour dépenser son énergie tout en apprenant à travailler avec les autres, à avoir un but commun, qu’il apprenne ce que c’est de gagner, comme de perdre (Dieu sait que ça arrive plus souvent qu’autrement et que ce n’est pas facile facile pour certains enfants… dont le mien). Il commençait à courir avec les amis, mais perdait l’intérêt après 10 minutes et préférait compter les brins de gazon dans la pelouse synthétique. Ouin… Je n’ai pas abandonné, il était peut-être trop jeune.

À 3 ans, nous avons finalement pu l’inscrire au patin pour éventuellement le lancer dans le hockey, le fameux sport chouchou du papa et du grand-papa. Ce sport qui demande tant aux parents comme aux athlètes, ce sport qui fait rêver les parents, qui fait stresser les spectateurs, qui fait crier les partisans. Ce sport… qui demande de se tenir debout sur des patins! À la fin de ses 10 cours (et quelques pratiques avec papa), il avait encore de la difficulté à simplement se tenir debout sur ses patins. Bon… Je n’ai pas abandonné, si ce n’était pas le hockey, peut-être que ce serait le soccer, plusieurs enfants y jouent.

À 4 ans, retour au soccer (après 2 cours de karaté toujours infructueux, vous ne pourrez pas dire qu’on n’a pas essayé) en «forçant» même mon chum à être assistant coach. Je me disais que ça deviendrait leur sport à eux, leur moment de la semaine où ils pourraient se rapprocher en développant leur complicité, leur écoute, leur lien, qu’ils se motiveraient l’un l’autre… Au bout de 3 ou 4 cours, ni mon chum, ni mon garçon ne voulait retourner au foutu soccer. C’est à ce moment que j’ai décidé d’abandonner l’idée que mon garçon serait sportif.

L’idée d’abandonner m’a fait un petit pincement au cœur et a un peu remis en question mon idéal éducatif, mais je vous assure que je n’en ai pas pleuré. Mon garçon est en santé, il est beau, intelligent, doux, gentil, il partage, il dit merci (bon, une fois du 2), je l’aime et il m’aime. Même si je ne peux m’appuyer son mon modèle d’éducation impliquant le sport, je sais que je vais trouver une façon de bien l’encadrer avec mes valeurs, mais surtout avec mon amour. Et devinez qui n’a plus besoin de se lever les samedis matins….

One response to “Le deuil sportif

  1. Je me vois tellement la dedans avec mon garçon qui a 12 ans aujourd’hui aucun sport ne lui plaisait. Mais j’ai fini par trouver maintenant qu’il est au secondaire il a plein de possibilités de sport et je lui en ai trouver un le cross-country! Il aime tellement ça. C’est un sport individuel et il est à beaucoup plus de motivation puisque c’est pour son dépassement personnel. Ne perd pas espoir il va grandir et un jour il va avoir un intérêt pour quelque chose. Ha s’en oublier qu’il a fait du ski en 3 et 4 ieme année et il a adoré aussi.

    J’ai bien aimer votre article. Merci!

    Véronique Verreault

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