Tu vois partout des photos de futures mamans heureuses de leur bedon tout rond. Elles sont radieuses et si jolies. Elles vendent le rêve que la maternité, c’est beau et agréable en tout point. Mais ta réalité n’est pas pareille.

Ta réalité t’a menée jusqu’au lit d’hôpital en urgence. Tu culpabilises à t’en rendre malade, car l’enfant qui grandit dans ton ventre mérite mieux qu’une mère qui ne va pas bien. Tu culpabilises car tu n’en veux plus de cette grossesse. T’as même déjà pensé à comment t’en débarrasser. Tu culpabilises en pensant à ce que ton chum penserait. C’est une situation très paradoxale. T’as toujours désiré être mère. Malheureusement, c’est un amalgame de choses et d’événements qui t’ont menée à cet état-là. La société dit que les hormones de grossesse font des montagnes russes, mais toi, tu sens qu’elles voguent telles une chaloupe en plein ouragan.

La maternité est dure sur ton corps et ta tête. Tu n’as pas le corps d’une échalote, mais bien d’une betterave, plein de rondeurs et d’imperfections. Sa couleur est très attirante et jolie, mais les « pucks » de la vie sont de plus en plus présentes et surtout voyantes. Il est vrai que tu ne l’aimes pas ton corps de betterave, c’est quelque chose d’ancré depuis ton enfance. Cependant avec la grossesse, le bedon qui grossit, les vergetures qui prennent de l’expansion et les vêtements qui ne font plus, c’est dur sur le mental. C’est dur de se convaincre que ça va partir, c’est dur de ne pas se sentir coupable lorsqu’on ne mange pas bien ou trop, car on mange ses émotions. Tsé, la seule façon que t’as appris à les gérer pendant les 20 dernières années…

Il n’y a pas seulement ta faible estime de soi qui t’as menée où t’en es. Ton travail, tsé celui qui faisait que tu revenais à la maison brûlée et à bout de souffle. Pas parce que tu n’aimes pas ton travail, simplement parce que t’es fatiguée. Ta to do list ne fait que s’allonger! T’as été malade comme ça ne se peut pas au premier trimestre, tu t’accrochais au deuxième trimestre en te disant que t’allais ressentir la fameuse montée d’énergie, mais en vrai, tu ne l’as jamais vue se pointer le nez. Lorsque t’as dit à ton supérieur que t’étais épuisée, on a ignoré ton état en te donnant du travail supplémentaire. Ta gynécologue t’a mise en congé de maladie, voyant ton état précaire. Par contre, ton employeur n’accepte pas ton billet médical. Comme si t’étais en état de bouger pour faire les démarches administratives. Tu n’as pas le choix, sinon tu dois retourner travailler.

À cela, on peut aussi ajouter les commentaires et les opinions des autres. Des personnes de ton entourage qui ont voulu bien faire en te donnant conseils et opinions, alors que t’avais rien demandé. Ou encore, les commentaires sur ton corps, qui est tellement un complexe chez toi. Des « t’as pas le fameux glow» ou « tu la portes basse ta bedaine », ne sont pas vraiment des choses à dire à une femme enceinte. Encore moins la fameuse question « est-ce que c’est ton premier? » toujours très difficile à répondre, quand tu as eu une fausse couche avant cette grossesse. Les gens ne comprennent pas que ça blesse d’être constamment comparée aux autres, alors qu’en réalité, ton corps a quand même subi deux grossesses! Il était prêt lui, il savait comment se transformer.

Assise dans une chambre d’hôpital à l’étage de la maternité en attendant de voir un psychiatre, je suis épuisée et fatiguée. Étrangement, mon corps réussit à produire encore des larmes, malgré les efforts du personnel hospitalier qui tente de me réconforter, mais sans succès. Ma peine est grande et vive.

Je suis une maman en création avec une dépression prénatale.

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