Mais quelque part vers 11 ou 12 ans, quelque part entre la morphologie qui change et les boutons qui apparaissent, le comportement des gens change. Les commentaires sont parfois désagréables et sous-entendent tous les défauts de votre corps entre deux états. Ils vous décrivent comme des dépendants aux écrans, lâches et peu débrouillards. Ils parlent avec arrogance de vos comportements parfois maladroits qui ont quitté l’enfance sans être parfaitement entrés dans l’âge adulte. Ils ne voient plus le gamin mignon en vous, celui qui aime encore Halloween en secret et qui attend Noël avec impatience et ne voient pas non plus celui à qui l’on peut accorder sa confiance et qui peut accomplir des tâches plus adultes. Comme si on vous mettait en quarantaine, le temps de laisser devenir grands des enfants qui pensent un peu plus, qui se cherchent un peu plus, qui s’affirment un peu plus, qui dérangent un peu plus, qui apprennent…
Certes, il y a les bras trop longs, le pinch mou, les boutons, les seins et les courbes qui ne savent pas encore s’équilibrer sur un corps en constant changement. Bien sûr, il y a le caractère un brin plus piquant et des idéaux de jeunesse un peu naïfs, mais j’aimerais que vous sachiez comme je vous trouve beaux, lumineux et rafraichissants! Vous avez tellement de rêves et d’envies, d’idées. Vous avez l’espoir et foi en l’humanité… Vous croyez aux changements et à tout ce à quoi les générations avant vous ont cru… Parfois, j’ai l’impression qu’ils ont oublié ce que c’est que d’y croire…
La manière dont vous voyez le monde est tellement belle, votre regard neuf m’amène même souvent à repenser ma propre vision. Vous incarnez le changement et vous l’exprimez tellement mieux que moi à votre âge.
Votre ouverture sur le monde est si grande et pourtant, j’ai l’impression que votre connaissance de vous-même est parfois meilleure que celle de bien des adultes.
Là où certains voient de l’opposition, je vois plutôt des idées. Là où certains voient de la rébellion, je vois une volonté d’être, d’argumenter et de changer le monde.
J’ai la chance d’avoir des adolescents heureux et pleins de vie. J’ai la chance d’avoir des adolescents qui me parlent et qui me laissent encore une grande place dans leur vie. J’ai la chance d’avoir cette relation qui va au-delà de la cohabitation dont tellement de parents se plaignent.
Sachez mes ados que je n’ai pas la prétention de tout savoir, mais j’ai la prétention de vous aimer tant que peu importe vos choix ou vos idées, je serai quelque part pas trop loin pour vous tendre la main ou l’oreille. Si la vie est magnifique ou difficile, j’ai envie de la vivre avec vous. Je partagerai vos peines et vos joies sans jugement, parce que vous voir devenir doucement de jeunes adultes, tout en reconnaissant l’enfant que j’ai vu grandir, est un des privilèges que j’ai eu la chance de semer dans ma vie alors que vous étiez tout petits. Tel le haricot magique, vous avez grandi plus vite que je n’aurais cru possible, forts et beaux, mes magnifiques ados.